Alors qu’actuellement, le parent est considéré comme le premier responsable de son enfant, quelle est notre responsabilité collective à l’égard de la réponse aux besoins des enfants?
C’est avec l’espoir d’une transformation profonde favorisant une responsabilisation collective, que nous revendiquons une Charte des droits de l’enfant au Québec. Plus qu’une simple ratification de la Convention relative aux droits de l’enfant, cette Charte aurait le pouvoir de nous contraindre à agir collectivement pour répondre aux besoins des enfants, notamment en mettant en place des conditions qui favorisent le développement du pouvoir d’agir de ses parents et des acteurs au plus près de leur quotidien (milieux de garde, écoles, organismes communautaires, etc.).
Une Charte des droits de l’enfant nous obligerait à orienter notre travail de manière à offrir les ressources nécessaires pour répondre aux besoins des enfants au quotidien, qu’on travaille à la législation, en gestion, en intervention ou en éducation. Un pouvoir de contrainte permettrait d’orienter davantage les ressources vers la réponse aux besoins des enfants dans leurs milieux de vie et dans leur communauté (ex. : financement des milieux communautaires à la mission). Une telle charte nécessiterait qu’on repense l’attribution des moyens et qu’on se concentre sur une action intersectorielle pour répondre ensemble à la multi dimensionnalité des besoins des enfants et de leur famille (ex. : approche de l’initiative Action Intersectorielle pour le Développement des Enfants et leur Sécurité [AIDES]). Cela nous contraindrait à investir dans la réponse aux besoins fondamentaux des enfants en limitant ainsi les dépenses liées au dépistage, à l’évaluation et aux interventions réactives sur des problèmes dont on aurait pu prévenir l’émergence.
En somme, une Charte des droits de l’enfant nous imposerait d’agir de manière cohérente et durable pour répondre aux besoins des enfants. Accompagnée de moyens concrets, elle permettrait une action collective, intersectorielle et une réelle coordination pour limiter l’éparpillement des ressources, tout en allégeant la pression sur des services de derniers recours déjà surchargés.
La Charte des droits de l’enfant reconnaitra que l’enfant est un sujet de droit et que son intérêt doit être la considération principale de toutes les décisions prises son sujet. Nous proposons l’affirmation que le Québec est une société bienveillante et que le bien-être de tous les enfants est une responsabilité collective.
En cette Journée internationale des droits de l’enfant, nous avons l’opportunité de faire un pas décisif vers un Québec plus juste et responsable envers les enfants.
Régine Laurent, ex-présidente de la Commission spéciale sur les droits des enfants et la protection de la jeunesse (CSDEPJ)
Jean Simon, ex-commissaire de la Commission spéciale sur les droits des enfants et la protection de la jeunesse (CSDEPJ)
Catherine Bélanger Sabourin, professeure, École de travail social de l’UQAM
Isabelle Perreault, directrice générale, Répit Providence
Nathalie Plante, professeure, École de travail social de l’UQAM
Claire Chamberland, professeure émérite, École de travail social de l'UdeM et vice-présidente de l’OSBL Organisation AIDES (OA)
Carl Lacharité, professeur émérite, Département de psychologie, UQTR et président OA
Danielle Lessard, coordonnatrice de recherche, secrétaire-trésorière de OA
Écouter l'entrevue de Régine Laurent à Tout un matin, avec Patrick Masbourian